LA JEUNE BERBÈRE Publié le 30 septembre 2005 par LE PETIT GOUBLIN La jeune Berbère Souad MASSI "Tant pis pour moi" "Au printemps Tipasa est habitée par les dieux et les dieux parlent dans le soleil et l'odeur des absinthes, la mer cuirassée d'argent, le ciel bleu écru, les ruines couvertes de fleurs et la lumière à gros bouillons..." A. Camus (Noces à Tipasa) Tipasa est encore habitée par les dieux…. Souviens-toi Souad, tu n'avais pas encore dix-sept ans. Tu étais fraîche et belle comme une image d'Évangile, avec tes longs cheveux blonds tressés sagement sur ton dos cuivré. Ce jour-là, je t'ai pris la main et nous nous sommes enfuis tous les deux, franchissant sans peine l'enclos qui était censé protéger les ruines mythiques, juste après ces cabanons de Matarès que Pouillon a détruits quelques années plus tard, pour tenter de ré-édifier ici une autre grandeur passée... Au milieu, notre cabanon à Matarès (Tipasa) À nos côtés, toutes ces pierres ocres dorées par le soleil contrastaient crûment avec le bleu intense du ciel et celui de la mer plus animé, ourlé d'écume, tandis que les verts multiples de la végétation sauvage s'efforçaient d'adoucir ce duel du froid et du torride décliné en bleu-jaune. Nous avons crié notre joie d'être vivants tous les deux dans les amas de pierres et dans les creux des édifices effondrés. Le lendemain, le gardien du musée m'a dit que des fous, des Vandales ou des malfaiteurs avaient dû pénétrer dans l'enceinte du site. Il était inquiet car des vols avaient eu lieu dans les environs… Je l'ai assuré qu'il ne pouvait s'agir que d'échos qui remontaient de la mer. Évidemment, il ne m'a pas cru : "Des fous ! Des vandales !…" Mais aujourd'hui petite, la vie t'a quittée. Un crabe redoutable a eu raison de ton énergie et de tes combats. Tipasa et ses ruines puis la masse imposante du Chenoua JJe pense souvent à toi, moi qui n'avais guère plus de vingt ans alors, et pour qui ton amour était comme un tabou mortel...